(BIOTECHFINANCES N°974 Lundi 7 février 2022) Les transplantations du cœur artificiel Aeson ne reprendront pas avant octobre 2022 ». Le verdict est tombé cette semaine, prononcé par Stéphane Piat, PDG de Carmat. Aussitôt la bourse a réagi, sanctionnant de 20% le cours de l’action cotée à Paris. La medtech, qui a élaboré le 1er dispositif capable de remplacer le cœur humain, temporairement dans l’attente d’une greffe, accuse donc un nouveau coup dur.
Des composants défectueux
Depuis l’arrêt volontaire en décembre de toutes les opérations à la suite du décès de deux patients, le marché est dans l’expectative. Après plusieurs semaines d’analyse approfondie, il ressort que ces complications proviennent de la mauvaise qualité d’un composant électronique et d’un composant mécanique du groupe des pompes. « Des actions correctives, majoritairement des contrôles additionnels, vont être mises en place » a assuré Stéphane Piat. « Ces situations sont inhérentes à ce type de processus médicaux, surtout au moment de l’augmentation de la cadence pour la commercialisation des produits », a-t-il précisé. Carmat qui vend ses prothèses depuis l’été dernier avait atteint une cadence de production de 16 unités par mois. « Je pense que nous avons désormais fait le tour de la majorité des problèmes de qualité », a déclaré le Pdg. Et de rappeler qu’on est loin des complications survenues en 2013 lors des premières opérations « ou le design du cœur était en cause ». En attendant les puces incriminées dans les dysfonctionnements ne seront plus utilisées pour la production d’Aeson et l’assemblage des prothèses ne reprendra qu’après la production de nouveaux composants.
Visibilité financière réduite
Le calendrier commercial et celui des essais cliniques vont donc être décalés. Pour rappel, Carmat a obtenu le marquage CE fin 2020 dans l’indication de « pont à la transplantation » et vendu en 2021, 7 prothèses dont 5 en Allemagne et 2 en Italie, générant environ 2 M€ de chiffre d’affaires. En parallèle, la medtech finalise une étude pivot en Europe afin d’atteindre son objectif de 20 transplantations. L’entreprise est en contact avec les agences sanitaires Dekra et l’ANSM afin de redémarrer les interventions au plus vite. Elle devra aussi obtenir le feu vert de la FDA pour poursuivre son étude de faisabilité aux Etats-Unis. Le timing est serré puisque Carmat prévoit la mise sur le marché américain de son dispositif à horizon 2025. A l’heure actuelle, trois patients équipés du cœur artificiel Aeson demeurent étroitement surveillés et Carmat a demandé à ce qu’ils soient transplantés rapidement.
Les ennuis volant en escadrille, l’entreprise connaît avec cet arrêt brutal d’activité une situation financière tendue. Sa visibilité s’arrête à juillet 2022. Pour équilibrer les comptes jusqu’à l’été, elle a dû réduire ses dépenses et ses commandes. « Les fonds aux poches profondes ont une aversion au risque, il est difficile de trouver des financements de plus de 12 à 15 mois » regrette Stéphane Piat. Le PDG de Carmat espère une contribution de l’Etat français dans le cadre du plan santé 2030 sans quoi « il ne sera pas possible de créer un écosystème ».
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