Après avoir levé 31 MS en juin 2022 en série A, la medtech franco-américaine opère un nouveau tour de financement qui lui permet d’envisager la commercialisation de son système unique au monde, baptisé Maestro, d’ici deux à trois ans.

À peine un an après son premier tour de table de Serie A de 31 M$ en juin 2022, Moon Surgical a annoncé le 17 mai dernier avoir sécurisé une nouvelle levée de fonds, d’un montant de 55,4 M$. Un financement mené conjointement par Sofinnova Partners, le plus ancien capital-risqueur d’Europe dans les sciences de la vie et par la branche investissement du géant informatique NVIDIA, en plus des participations individuelles de Fred Moll et Josh Makower. “Nos investisseurs historiques GT Healthcare Capital, Cathay Health, Johnson & Johnson Innovation, et la stratégie Sofinnova MD Start de Sofinnova Partners, ainsi que Yann Fleureau, Siddarth Satish, Sacha Loiseau et Richard Leparmentier ont également participé à ce nouveau tour de financement”, se félicite Anne Osdoit, PDG de Moon Surgical.
Créée en 2019 par le professeur Brice Gayet, un chirurgien laparoscopique renommé, la medtech franco-américaine développe un système, baptisé Maestro, qui n’a encore jamais été proposé en chirurgie robotique. “La technologie que Moon Surgical déploie est unique au monde et elle pourrait changer la façon dont la chirurgie robotique est pratiquée”, assure Anne Osdoit, également Partner au sein de l’accélérateur medtech MD Start de Sofinnova Partners, qui incube la medtech depuis 2020. Comment ? En replaçant le chirurgien au plus près du patient à l’intérieur du bloc opératoire, et en lui permettant “de contrôler entièrement les tâches qui seraient autrement effectuées par un assistant, de manière beaucoup plus fluide et pratique”, détaille Fred Moll, qui vient d’être nommé Président indépendant du Conseil d’Administration de la société basée à Paris et à San Francisco.
Le système Maestro de Moon Surgical s’est particulièrement fait remarquer ces derniers mois : “Nous avons obtenu l’autorisation de la FDA en décembre 2022 puis le marquage CE de Maestro en avril dernier”, précise Anne Osdoit. Des progrès réglementaires qui sont venus s’ajouter à des avancées dans le domaine clinique : “Nous avons déjà traité 50 patients sur sept indications au 30 avril 2023, contre une trentaine en fin d’année dernière. Cette expérience clinique nous permet de dérisquer notre produit et a clairement participé à attirer les investisseurs. Compte tenu du contexte économique actuel compliqué et de perspectives incertaines en matière de financements, nous avons décidé d’accueillir les mains tendues et d’opérer cette nouvelle levée de fonds, un peu plus rapidement que prévu initialement. Cette étape importante nous permet de sécuriser le lancement de la production de notre système à l’échelle industrielle et de bénéficier de plus de visibilité pour dérouler notre plan de commercialisation, prévue d’ici 2025”, confie Anne Osdoit.
Des économies importantes pour les cliniques privées
Jusqu’alors, la chirurgie robotique concerne surtout des procédures et des indications complexes. Elle déporte le chirurgien en dehors du champ opératoire : il est derrière une console et manipule des manettes et des pédales, tandis qu’à quelques mètres de là, le robot, très sophistiqué et très coûteux, est dans l’environnement stérile et nécessite un ou plusieurs assistant(s) chirurgical(ux) tout au long de l’opération. Avec Maestro, Moon Surgical veut démocratiser la chirurgie robotique en proposant un produit “beaucoup plus léger et modulaire mais tout aussi précis et stable, qui permet au chirurgien de rester aux côtés de son patient et de contrôler facilement les instruments”, précise Anne Osdoit. Selon Fred Moll, Moon Surgical “apporte une grande valeur au sein des blocs opératoires où les chirurgies laparoscopiques sont effectuées”. Autrement dit, au sein de quasiment tous les blocs opératoires puisque les chirurgies laparoscopiques qui concernent les chirurgies des tissus mous (abdominales, thoraciques, urologiques ou gynécologiques) sont extrêmement courantes et que 94% d’entre elles ne sont aujourd’hui pas assistées par un robot chirurgical.
Ainsi, le système Maestro permet-il “de s’adresser à n’importe quelle chirurgie, dans n’importe quelle salle d’opération, et de proposer un business model plus facile à gérer pour les établissements de soins, notamment les cliniques privées, où il y a de gros volumes de procédures chirurgicales et où les problématiques d’efficience et de rentabilité sont importantes”, conclut-elle. Et de poursuivre : “En dotant le chirurgien de deux bras supplémentaires pour qu’il puisse tenir lui-même sa caméra et explorer le tissu d’intérêt, il n’a pas besoin tout le temps de son assistant chirurgien. Ce qui permet de redéployer cette ressource humaine sur d’autres missions, comme celle de préparer la prochaine intervention par exemple”. Un gain de temps de quelques minutes par intervention qui, sur une journée complète, peut permettre à une clinique de recruter un patient supplémentaire, pour une ablation de vésicule biliaire ou une chirurgie de l’obésité. Tandis que le chirurgien apprécie le “retour” au bloc : d’après Anne Osdoit, “les retours qualitatifs que nous avons recueillis indiquent que les chirurgiens ressentent moins de fatigue physique et cognitive”.
Prochaine étape pour le système Maestro, la construction d’un outil industriel, avec la création d’une première usine d’assemblage des bras robotisés, probablement en Ile-de-France. Puis viendra la phase de validations et de tests, avant de viser en premier le marché américain, où quelque 800 000 opérations chirurgicales sont effectuées chaque année, sur les vésicules biliaires, les hernies ou les appendices, respectivement.
Marine Rabreau







