Après un peu moins d’un an, Emmanuel Lignier, qui avait, en mars 2024, remplacé Paul Navarre au poste de CEO de Cerba Healthcare, serait à son tour sur le départ. Ce changement de gouvernance au sommet du spécialiste de la biologie médicale et de la médecine de précision pourrait être la conséquence d’une récente chute de la valeur des obligations de Cerba. Le fonds d’investissement EQT AB, actionnaire majoritaire, examinerait les options relatives à l’étalement de la dette pharaonique de la société. En effet, en 2021, l’entrée du fonds suédois a été financée par une nouvelle dette de plus de 3 Mds€ de prêts à terme et de facilités de crédits renouvelables, ainsi que 1 Md€ d’obligations, certaines garanties, d’autres non, et aux dates d’échéance proches (2028 et 2029). Une situation qui fait de Cerba Healthcare l’un des plus grands emprunteurs de prêts à terme libellés en euros, et probablement l’un des champions du LBO après six consécutifs. Au demeurant, en septembre 2024, l’agence Moody’s, face à une dette brute de la société qui représenterait 10x son EBITDA, a jugé pertinent de rétrograder les titres d’emprunt de Cerba Healthcare en Caa1, la septième catégorie d’une échelle qui en compte neuf. Malgré sa position de leader du marché français, la nouvelle avait de quoi refroidir le fonds EQT, qui, en 2021, rachetait Cerba à Partners Group et à Investment PSP (office d’investissement de régimes de pensions du secteur public du Canada), en surfant sur une demande de diagnostics et de laboratoires augmentée par la crise sanitaire.À l’époque, on a assisté à une véritable envolée des valorisations, due à la fois aux conditions de marché (demande accrue), mais aussi à un enthousiasme communicatif des fonds d’investissement. Par ailleurs, à l’instar de la medtech, les croissances externes sont un élément essentiel dans le mécanisme de création de valeur. Ainsi, en 2023, Cerba a fait l’acquisition de la société de recherche sous contrat (CRO) canadienne Cirion Biopharma Research, ouvrant ainsi à la société française le marché canadien, mais apportant aussi des capacités dans le domaine du développement des biosimilaires et des produits biologiques, ainsi que dans les tests pharmacocinétiques-pharmacodynamiques (PKPD) et d’immunogénicité.
Auparavant, en 2021, c’est Viroclinics-DDL qui était passée dans le giron de Cerba, offrant au laboratoire une large gamme de services de virologie dans le domaine des essais cliniques et non cliniques, des diagnostics cliniques, du développement d’essais et de la logistique des essais cliniques. En 2017, après l’acquisition d’Antagene, laboratoire de génétique vétérinaire, Cerba avait racheté les laboratoires italiens Deltamedica et Fleming Research.Mais aujourd’hui, la crise sanitaire s’est dissipée, de même que la contribution au chiffre d’affaires des tests COVID-19, et ne reste que la pression de la dette dans un marché aux comportements plus traditionnels. Toutefois, Cerba devrait continuer à croître de manière stable et à générer des flux de trésorerie solides, notamment grâce à la résilience de son modèle.