La biotech franco-suisse obtient un crédit de 25 millions d’euros auprès de la BEI afin de poursuivre le test de son anticorps initié fin 2022. En cas de succès, elle pourra rapidement monter la cadence de production.
Le défi est récent mais déjà immense : « en faisant une estimation prudente de 10 % des personnes infectées sur plus de 651 millions de cas documentés de Covid-19, le nombre réel étant probablement beaucoup plus élevé, au moins 65 millions de personnes dans le monde ont, à ce jour, contracté le Covid long et leur nombre augmente de jour en jour », soulignait la revue Nature Reviews Microbiology dans un article de janvier dernier. Le Covid long ne touche qu’une partie des personnes infectées, de tous âges et se manifeste par des symptômes divers, persistant au-delà de trois mois et généralement graves tels qu’une fatigue intense ou encore des troubles cognitifs et sensoriels. « Chez environ un quart des patients atteints de Covid long, on a détecté dans le sang la protéine pathogène W-ENV qui n’a aucune fonction physiologique. On la trouve exprimée uniquement dans des conditions pathologiques, comme dans le cerveau de patients atteints de sclérose en plaques », explique Jesus Martin Garcia, cofondateur et PDG de GeNeuro. Malgré son jeune âge, cette biotech basée à Genève et à Lyon et née en 2006 après un spin-off des laboratoires de l’Inserm et de bioMérieux, est mondialement reconnue comme le spécialiste de ce type de protéines pathogènes. Celles-ci jouent un rôle dans la progression du handicap dans des maladies neurologiques, telles que la sclérose en plaques ou la maladie de Charcot.
6 milliards d’euros débloqués par la BEI
Dans son centre de recherche à Lyon, GeNeuro a mis au point un anticorps, le temelimab dont l’efficacité sur les biomarqueurs de la neurodégénérescence a déjà été démontrée sur plus de 300 patients atteints de sclérose en plaques.

« Dès fin 2020, nous avons commencé à collaborer avec différents instituts de recherche dans plusieurs pays qui demandaient à avoir accès à nos connaissances sur le W-ENV pour évaluer la possibilité d’utiliser temelimab comme traitement pour le covid long. Fin 2022, nous avons démarré notre essai phase 2 en recrutant des patients en Espagne, Suisse et Italie. Nous avons l’objectif de traiter 200 patients qui recevront notre anticorps une fois par mois pendant six mois. Nous nous attendons à avoir les premiers résultats en fin d’année », détaille le dirigeant. Pour mener cet essai à bien et surtout afin de préparer une rapide montée en puissance de sa production, réalisée aujourd’hui à Vienne (Autriche), en cas de résultats positifs, la biotech a levé 7,7 millions d’euros en mai dernier. Elle sait désormais qu’elle aura les moyens de ses ambitions car elle vient de signer un accord de crédit de 25 millions d’euros auprès de la Banque Européenne d’Investissement (BEI). « La première tranche de 7 millions d’euros, disponible immédiatement, est destinée au soutien de l’essai clinique de phase 2. Les autres tranches de 10 millions d’euros et de 8 millions d’euros étant destinées respectivement à la préparation et au lancement de la phase 3 », précisent les deux partenaires.

En réponse à la crise sanitaire, la BEI a débloqué à date plus de 6 milliards d’euros. « Après avoir soutenu financièrement les recherches en matière de vaccins prophylactiques ainsi que celles visant au traitement contre la COVID aiguë, la BEI, au travers du financement apporté à GeNeuro, entend accélérer le développement d’une cure contre le Covid long. Il s’agit de l’une des premières biotechs bénéficiant du nouveau programme de l’Union Européenne InvestEU qui prodigue à la BEI de nouvelles ressources. Cette opération complète l’arsenal de solutions déployées pour lutter contre la Covid-19 que mènent les biotechs européennes ayant profité du soutien de la BEI grâce à son programme de venture debt », détaille Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI. « Notre approche de médecine personnalisée pourrait, en cas de succès de l’essai clinique en cours, proposer une solution thérapeutique à des millions de patients affectés par le Covid long », espère Jesus Martin Garcia, qui veille à ne pas susciter de faux espoirs. Les équipes de GeNeuro, récemment rejointes par cinq personnes portant le total à 16, se tiennent prêtes à apporter leur pierre à l’édifice.
Annelot Huijgen







