(BIOTECHFINANCES N°971 Lundi 17 janvier 2022) « The Wild West of Checkpoint Inhibitor Development » ou l’Ouest Sauvage du développement des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire, voilà le titre d’une tribune du New England Journal of Medicine (NEJM). Elle n’est pas signée par un quelconque groupe d’activistes opposé à l’industrie pharmaceutique ou par des lobbyistes inquiets du prix des médicaments, mais bien par deux membres éminents du Centre d’Excellence en Oncologie de la FDA : Julia Beaver et Richard Pazdur. Cette structure issue du « 21st Century Cures Act » a pour but de faciliter le développement et l’examen clinique des produits oncologiques en réunissant des experts scientifiques dans tous les centres de produits de la FDA afin d’effectuer un examen accéléré des médicaments, des produits biologiques et des dispositifs.
Dans cet article, Beaver et Padzur, évoquent avec cette image de l’Ouest Sauvage, une sorte de zone frontière, de marchés par essence limitrophes, où les comportements loin d’être contrôlés seraient plutôt erratiques. Les auteurs évoquent, tout en la déplorant, la relative facilitée d’enregistrement « accélérée » de molécules (45 % des indications dans cette classe de PD(L)-1 ont emprunté la voie accélérée) ayant peu ou prou le même mécanisme avec des essais cliniques à bras unique, au motif que les essais traditionnels (randomisés, aveugles, contre placebo ou standard de traitement) ne donnent pas de bons résultats en immuno-oncologie. Le biais semble encore plus grave si l’on considère que les 7 anti-PD-1/PD-L1 enregistrés auprès de la FDA n’ont pas été comparés entre eux, afin de graduer leur efficacité. D’ailleurs, les composés actuellement en développement ne devraient pas l’être non plus. Une attitude qui ouvre la porte à une concurrence féroce sur les indications puisque pas moins de 85 indications en cancérologie sont suivies dans plus de 2 000 essais cliniques.
Entente sur les prix ?
Mais il est un lieu où la férocité des industriels s’exprime moins, c’est au niveau des prix, puisque les nouveaux traitements se vendent à des prix identiques sinon supérieurs pour des améliorations thérapeutiques parfois marginales. Certaines personnes mal intentionnées pourraient y voir une sorte d’accord tacite livrant le marché de l’immuno-oncologie à quelques grands laboratoires avec pour maxime marketing « Vae Victis ! », (Malheur aux vaincus !) selon Brennus. Des possibilités de combinaison rendent parfois moins amère cette défaite annoncée. Toutefois, il semble que la FDA soit déjà en train de revoir plusieurs approbations « accélérées » en suspens à l’aune de ces interrogations puisque l’ODAC (Oncologic Drugs Advisory Committee) a repoussé sine die une dizaine de ces demandes pour des motifs allant d’une faible efficacité à des procédures d’enregistrement régulières et non plus accélérées.
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