(BIOTECHFINANCES N°986 Lundi 9 mai 2022) Tubulis passe la vitesse supérieure. Moins de deux ans après avoir levé 10,7 M€ dans le cadre d’une série A, la biotech allemande, créée en 2019 à la suite d’un spin-off entre le Leibniz-Forschungsinstitut für Molekulare Pharmakologie (FMP) de Berlin et la Ludwig-Maximilians-Universität (LMU) de Munich, a bouclé la semaine dernière une deuxième augmentation de capital, d’un montant de 60 M€. Spécialisée dans le développement de conjugués anticorps-médicaments (ADC), celle-ci entend utiliser le produit de cette opération pour accélérer le développement de ses propres ADC. Toujours en phase de R&D, elle ne génère à ce jour pas de revenu.
Une « ADC task force » interne
L’ensemble de ses actionnaires existants ont participé à ce nouveau tour de table, en l’occurence BioMedPartners, High-Tech Gründerfonds (HTGF), Seventure Partners, coparion, Bayern Kapital et OCCIDENT. En parallèle, l’entreprise a accueilli trois nouveaux fonds : Evotec, Fund+ et Andera Partners, qui a par ailleurs dirigé ce financement. Les tickets investis et la participation de chacun sont confidentiels. Pour le spécialiste français du non coté, qui accompagne déjà des biotechs et des medtechs à travers son activité Andera Life Sciences et qui a lancé l’an dernier un méga-fonds dédié aux sciences de la vie (Biodiscovery 6), cette transaction constitue une première. « Tubulis est le premier investissement d’Andera Life Sciences dans une entreprise qui a développé des technologies propriétaires dans le champ des ADC », précise Sofia Ioannidou, associée, PhD, chez Andera Partners. Convaincues du potentiel financier de cette technologie (voir encadré), les équipes d’Andera Partners avaient constitué il y a un an environ une task force interne dédiée, quelques semaines après avoir notamment rencontré le management de Tubulis lors d’une conférence consacrée aux biotechs. « L’objectif de cette task force était de cibler d’une part, puis d’analyser d’autre part, les entreprises les plus prometteuses qui évoluent sur ce marché à l’échelle internationale, poursuit Sofia Ioannidou. In fine, nous en avons conclu que Tubulis, forte d’une technologie propriétaire, était le candidat idoine. »
Après cette incursion dans le champ des ADC, Andera Partners n’exclut pas d’investir dans des biotechs concurrentes dans les prochains mois. D’ici là, la société de private equity prévoit également de finaliser, via Biodiscovery 6 – d’une taille actuelle de 450 millions d’euros, le véhicule devrait boucler son closing final d’ici la fin de l’année –, d’autres prises de participation dans d’autres domaines du médical.
Une technologie au fort potentiel thérapeutique… et financier
Apparus au début des années 2000, les conjugués anticorps-médicaments (antibody drug conjugates, ADC) sont une classe de médicaments consistant à greffer sur un anticorps monoclonal un agent cytotoxique (anticancéreux). Du fait de leurs caractéristiques, les ADC ont vocation à traiter un cancer de manière ciblée. « Ils sont en effet censés identifier dans l’organisme les cellules tumorales et délivrer des chimiothérapies qu’à ces cellules, explique Sofia Ioannidou. En épargnant ainsi les cellules saines, ils sont de nature à offrir une meilleure efficacité thérapeutique et une plus grande sécurité pour le patient. » Ces dernières années, l’accélération des travaux de recherche et les avancées scientifiques se sont traduites par la commercialisation d’une dizaine d’ADC. Quelques partenariats ont également été noués entre des biotechs et des groupes pharmaceutiques, à l’instar de celui scellé en mars entre Sanofi et Seagen, tandis que Gilead avait racheté la biotech américaine Immunomedics (et son ADC Trodelvy) pour 21 Mrd$ en septembre 2020. Alors que le marché mondial des ADC enregistre une croissance annuelle supérieure à 20%, sa taille était estimée à 4,3 milliards de dollars en 2020. « Selon des estimations, les 12 ADC approuvés à ce jour par la Food and Drug Administration (FDA) dans le monde pourraient générer, à eux seuls, des revenus annuels supérieurs à 20 milliards de dollars dès 2030 », indique Sofia Ioannidou.
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