(BiotechFinances n°997 lundi 12 septembre 2022) Le one-health a le vent en poupe et Vetbiolix entend se positionner comme l’un des acteurs de premier plan dans ce domaine. Cette biotech vétérinaire installée dans le bio incubateur d’Eurasanté à Lille vient d’annoncer une levée de fonds de 2,5 M€. Créée en 2018, elle s’est assurée le soutien de CapTech Santé qui est le pilote de ce tour suivi de Nord France Amorcage, Bpifrance et un pool de business angels. Vetbiolix s’est choisi trois axes stratégiques : le repositionnement à destination vétérinaire de molécules first in class initialement développées pour la santé humaine, la mise au point de dispositifs médicaux adaptés aux animaux de compagnie et enfin le déploiement de produits de soins vendus sans prescription pour les chiens et chats.
Les maladies parodontales et l’arthrose d’abord
L’essentiel du cash collecté sera consommé dans un premier temps pour l’avancement des candidats médicaments. Vetbiolix portera ses efforts sur les études cliniques preuve de concept d’un nouvel inhibiteur de la cathepsin-K chez le patient chien souffrant de maladie parodontale et d’un agoniste de l’adenosine A3 contre l’arthrose canine. Pour les deux produits, la tolérance sera également testée chez le chat. Les choix collent précisément à la stratégie de sourcing de l’entreprise qui remporte un vif succès auprès des biotechs en santé humaine qu’elle approche. « Nous ciblons des candidats qui sont en toute fin de préclinique, idéalement déjà en clinique pour lesquels le package CMC a déjà été mené par nos partenaires, » souligne Matthieu Dubruque co-fondateur et président de Vetbiolix avec Matthieu Roquette, directeur général de l’entreprise. « Nos premiers résultats d’efficacité sont attendus pour fin 2023 début 2024 » ajoute de son côté Matthieu Roquette. Une prochaine levée de fonds est déjà envisagée en lien avec la réussite de ces prochaines étapes.
Les DM et le Care en interne
En attendant, l’entreprise poursuit sa route et continue de remplir son pipeline de médicaments. Mais elle garde aussi la main sur les dispositifs médicaux en développant ses prototypes en interne et sur le care. Elle travaille, là encore, sur ses propres formulations et compte avancer ensuite vers la preuve de concept clinique. Au-delà, et dans tous les cas, Vetbiolix n’ira pas à la commercialisation. Elle entend, en effet, s’établir sur un modèle de licensing avec upfront, milesone et royalties sur les ventes. Une sécurité de plus dans son modèle « agile ».
Bon ou mauvais signal ?
Dans un climat qui depuis quelques temps semblait profitable aux M&A ce blocage temporaire peut donner l’effet d’un coup de froid et il faudra en observer les répercussions. Jusqu’alors le ciel des opérations de ce type était plutôt sans nuage. « Depuis le début de l’année, nous avons dénombré 22 rachats de biotech cotées aux Etats-Unis et en Europe, » souligne Khalid Deojee, analyste en sciences de la vie chez Bryan Garnier. « C’est un chiffre qui est au-dessus de ceux que nous avons observé depuis 2010. » A bien y regarder, la liste et les montants sont impressionnants : Amgen-Chemocentryx à 4 Mrds$, Pfizer-Global Blood Therapeutics à 5,4 Mrds$, Pfizer-Biohaven à 11,6 Mrds$, UCB-Zogenix à 1 Mrd$, les acquisitions d’IPSEN, d’Alcon et encore celle potentiellement annoncée de Merck sur Seagen pour un montant de 40 Mrds$. La ronde des M&A durera-t-elle ? « Ce que l’on constate, c’est que les cibles sont toutes dans le périmètre de la commercialisation, » note Khalid Deojee. Une nouvelle d’intérêt pour les biotechs françaises dans les phases les plus avancées comme l’est, potentiellement, MedinCell pour ne citer qu’elle.
Tensions sur le cash
Au-delà, tout le marché du capital pour nombre d’entreprises des sciences de la vie reste tendu et souffre toujours d’un manque de visibilité. Certes, mi-juin, le SBI a rebondi de plus de 50% par rapport « à ses plus bas », mais la fenêtre des IPO reste close et les investisseurs sont concentrés sur les valeurs sûres à l’instar des big pharma. « Au second quadrimestre, 50% des biotechs européennes avaient moins de 12 mois de cash devant elles et parmi elles, les Françaises sont sans doute parmi les plus touchées », reprend Khalid Deojee. « Malheureusement, nous observons que nos entreprises de biotech cotées lèvent en moyenne des fonds qui leur donnent un cash runway assez court, souvent d’une durée de 12-15 mois. C’est un phénomène qui les met très vite dans une situation précaire ». De fait, la tension est plus que jamais palpable et les directions opérationnelles s’ingénient à trouver des sources d’économies et de refinancement pour 6 à 18 mois supplémentaires. Onxeo s’extrayant de la cote américaine est un exemple parmi d’autres des ajustements qui participent à augmenter la zone de confort. « Au Danemark, Saniona a mis en pause son programme lead. En Suisse, Addex Therapeutics a aussi coupé momentanément dans ses développements pour préserver son cash-runway, » illustre Khalid Deojee. De quoi alimenter un climat toujours plus anxiogène et nourri d’une incertitude grandissante qui alimente ce sentiment de fragilité de la santé et de ses acteurs les plus innovants.
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